DROIT DES
CONSOMMATEUR·
RICE·S
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Avec les aléas de la crise énergétique, la digitalisation des processus et les évolutions techniques liées à la transition énergétique, le marché de l’énergie bruxellois se complexifie. Dans ce contexte, BRUGEL propose régulièrement des avis et conseils au Gouvernement afin de placer les consommateur·trice·s au centre des mesures réglementaire décidées par les autorités publiques.
 

« En matière de règlements techniques, le double objectif du régulateur bruxellois est de favoriser la transition énergétique tout en instaurant un rééquilibrage en faveur des consommateur·rice·s », explique Karine Sargsyan, responsable du service Juridique et du service des Litiges. « Pour pérenniser l’équilibre du marché de l’énergie, les client·e·s sont bien évidemment tenu·e·s de respecter leurs obligations. Mais le rôle du régulateur consiste également à veiller ce que les opérateurs du secteur respectent les leurs. Et c’est justement cet arbitrage que nous nous efforçons d’instaurer dans toutes les démarches que nous initions. »


Pour le secteur de l’eau, la mission allouée au régulateur est sensiblement différente. BRUGEL dispose de compétences limitées (compétence tarifaire uniquement) sur un marché monopolistique. « Dans la lignée des actions et projets que nous avons initiés l’année dernière, BRUGEL a de nouveau veillé à ce que les opérateurs du secteur puissent s’inscrire dans une approche client. Cette prérogative reste l’un des grands défis que le secteur doit relever », précise-t-elle encore.

 
En matière de règlements techniques, le double objectif du régulateur bruxellois est de favoriser la transition énergétique tout en instaurant un rééquilibrage en faveur des consommateur·rice·s.
Karine Sargsyan
Responsable du services Juridique et du service des Litiges

Guide d’interprétation des obligations de service public

En tant qu’autorité chargée de veiller à la régulation dans les domaines de l’électricité et du gaz, BRUGEL dispose d’une compétence spécifique qui lui permet de contrôler les conditions générales appliquées par les fournisseurs dans leur contrat de fourniture d’énergie. Dans le cadre de cette compétence, BRUGEL avait pris l’initiative, en 2021, de réaliser un guide d’interprétation des obligations de service public à charge des fournisseurs. « Ce document, mis à jour en 2022 afin d’y intégrer toutes les nouvelles dispositions de protection des consommateur·rice·s, permet aux fournisseurs présents sur le marché de vérifier la portée de leurs conditions générales », précise Karine Sargsyan.

Modifications des conditions générales

Comme le prévoit l’ordonnance, BRUGEL demande aux fournisseurs à ce qu’ils lui communiquent de manière systématique les modifications qu’ils souhaitent apporter à leurs conditions générales ou qui sont induites suite à des nouvelles dispositions législatives. « Cette procédure présente un avantage indéniable », constate Karine Sargsyan. « Elle nous permet de mener un contrôle systématique de la conformité des conditions générales des fournisseurs. En 2022, nos équipes ont ainsi analysé et approuvé toutes les conditions générales des fournisseurs. »conformité des conditions générales des fournisseurs. En 2022, nos équipes ont ainsi analysé et approuvé toutes les conditions générales des fournisseurs. »

 

Fourniture de substitution : protection renforcée pour les client·e·s

Au regard du régime de fourniture de substitution, BRUGEL a proposé au Gouvernement bruxellois quelques pistes d’améliorations quant à la protection des droits des client·e·s du fournisseur défaillant. Cet avis stipule notamment qu’en cas de défaillance d’un fournisseur, les contrats conclus avec les client·e·s deviennent caducs. Les client·e·s risquent dès lors des coupures de gaz et d’électricité intempestives. Pour éviter de telles interruptions de fourniture, BRUGEL conseille de préciser, dans le cadre légal, que le transfert de la clientèle est réglementé. Dans ce même ordre d’idée, BRUGEL considère que le droit de changement de fournisseur pour l’ensemble des client·e·s du fournisseur défaillant doit être préservé sans condition. En d’autres termes, les client·e·s doivent pouvoir sortir à tout moment du régime de fourniture de substitution.

Fourniture par défaut

Le régime actuel bruxellois de fourniture de substitution prévoit que les conditions tarifaires de fourniture sont celles de la fourniture par défaut. Selon le régulateur bruxellois, cette approche présente plusieurs points d’achoppement. En pratique, le tarif par défaut n’existe pas pour les client·e·s professionnel·le·s et il ne concerne pas forcément des produits avantageux pour la clientèle résidentielle. Dès lors, l’application du tarif par défaut ne semble pas opportune.

Au regard du nouveau régime de fourniture de substitution proposé par BRUGEL, il conviendra de distinguer les conditions tarifaires lorsque le fournisseur de substitution est le gestionnaire du réseau de distribution (GRD) ou un fournisseur commercial. « Les tarifs de fourniture d’énergie par le GRD sont fixés par l’autorité fédérale. Il en existe deux : le tarif social et le tarif maximum. Lorsque les client·e·s seront fourni·e·s par le GRD, c’est le tarif maximum qui devra être appliqué. Si cette mission est par contre déléguée à un fournisseur commercial, les conditions financières devront être approuvées par BRUGEL dans le cadre de la procédure de délégation », précise Karine Sargsyan, responsable du service Juridique et du service Litiges.

Acomptes remboursables

Quant aux acomptes, il ressort de l’expérience des précédentes défaillances que, dans certains cas, un fournisseur dont le contrat d’accès est résilié continue à exister en tant qu’entreprise. Pour BRUGEL, ces entreprises doivent alors être tenues de rembourser aux client·e·s le trop-perçu des acomptes.

 

Comparateurs de prix

En raison de la forte variabilité des prix de l’énergie et des différents paramètres d’indexation utilisés par les fournisseurs d’énergie, les quatre régulateurs ont pris conscience de la nécessité de revoir la méthodologie de calcul de leurs comparateurs de prix. Basés sur un modèle où le contrat fixe dominait avec des fluctuations de prix bien moindres, les montants estimés lors de la simulation pouvaient fortement varier par rapport aux montants qui étaient réellement facturés au consommateur. « En cette période de crise, il était important d’offrir aux consommateurs un outil qui propose le classement le plus fiable possible des offres des fournisseurs mais aussi et surtout des estimations qui reflètent le plus fidèlement possible le coût annuel attendu de chaque produit sur le marché », explique Carine Stassen, responsable du service des Affaires socio-économiques.

Une méthodologie commune aux quatre régulateurs

C’est pourquoi, fin 2022, le VREG, la CWaPE, BRUGEL et la CREG ont décidé d’utiliser une méthode uniforme pour calculer le coût annuel estimé des contrats d’électricité et de gaz naturel à prix variables. « Nous avons décidé d’un commun accord d’utiliser la méthode appliquée par le VREG depuis mai 2022. Cette méthode prend en compte les prix de l’énergie prévus pour les 12 prochains mois, sur la base des cotations disponibles sur les bourses de l’énergie pour des livraisons futures », précise Carine Stassen.

 

Monitoring des prix

Le contexte de hausse des prix de l’énergie sur les marchés fin 2021 et les contingences géopolitiques observées à partir de février 2022 ont poussé les prix du gaz et de l’électricité à des niveaux extrêmement élevés tant sur le marché de gros que de détail. Afin d’évaluer l’impact de ces hausses sur les client·e·s et sur le marché, les trois régulateurs régionaux (BRUGEL, la CWaPE et le VREG) ont convenu avec l’ensemble des fournisseurs et la FEBEG (fédération des fournisseurs), que les requêtes et définitions de ce monitoring seraient communes pour les trois régions. « La méthode consistait à monitorer sur certains indicateurs sociaux l’impact de la crise : montant des dettes par mois, nombre de plans d’apurement, nombre de contrats, etc., ainsi que les ratios de contrats prix fixes et prix variables », explique Carine Stassen, responsable du service des Affaires socio-économiques.

Méthodologie innovante

Via ce reporting, plusieurs informations stratégiques ont pu être collectées et analysées. Ces informations ont permis aux législateurs de prendre les dispositions adéquates pour pallier aux effets de la crise. Ce monitoring a par exemple permis de déterminer que les montants des plans d’apurement des ménages bénéficiaires du tarif social (TSS) sont restés stables malgré la crise. « Les ménages TSS qui ont honoré leurs factures mensuelles dans les délais n’ont ainsi perçu aucun stress à l’arrivée de leur facture annuelle », confirme Carine Stassen. L’étude a également montré que les montants des factures énergie des ménages bénéficiaires du TSS étaient nettement moindres que ceux ménages résidentiels avec un prix variable. A contrario, il a été constaté, de mois en mois, une dégradation des conditions de paiement des petits professionnels.

Via le reporting réalisé, nous avons pu collecter et analyser plusieurs informations stratégiques, informations qui ont permis aux législateurs de prendre les dispositions adéquates pour pallier les effets de la crise.
Carine Stassen
Responsable du service des Affaires socio-économiques
 

Groupe de travail bruxellois

Dans la foulée de ces réunions, BRUGEL a coordonné à partir du 22 juin en Région de Bruxelles-Capitale une première réunion de travail avec les fournisseurs, les acteurs sociaux et le Cabinet du ministre Maron. « Lors de cette rencontre, les fournisseurs ont eu l’opportunité d’éclairer les analyses par des éléments qualitatifs : comportements des client·e·s suite aux augmentations de prix enregistrées, structures mises en place pour y répondre, etc. », précise Carine Stassen. « Quant aux acteurs sociaux, ces derniers ont pu faire remonter différents éléments d’incompréhension et de stress des ménages suite à ces augmentations de prix. »

BRUGEL a été particulièrement active lors des discussions et différentes mesures ont été adoptées à son initiative telles que le renforcement des mesures prises par les acteurs sociaux, la mise en place de dotations pour les PME et le renforcement du statut de client protégé (lire également page 36).

Plaintes et litiges

Le service des Litiges de BRUGEL est un organe extrajudiciaire qui tranche principalement des litiges opposant les consommateur·rice·s bruxellois·es aux fournisseurs d’énergie, au gestionnaire du réseau de distribution Sibelga et aux opérateurs de l’eau. « Ces plaintes sont prises en charge dans un souci de traitement accéléré, transparent et gratuit des litiges », précise Karine Sargsyan, responsable du service des Litiges. « Notre service examine toutes les plaintes, en toute indépendance et impartialité vis-à-vis des acteurs concernés et des plaignant·e·s. Dans l’exercice de ses compétences, nous ne recevons d’instruction ou d’ordre d’aucune autorité et toutes nos décisions sont contraignantes pour les parties concernées. » En 2022, les litiges ont principalement concernés les plaintes en rapport avec les consommations litigieuses, la difficulté à obtenir des documents administratifs et certaines pratiques des fournisseurs. Plusieurs dysfonctionnements plus spécifiques ont également catalysé l’attention du service.

Litiges dus au dysfonctionnement du MIG6

L’implémentation en demi-teinte de la nouvelle plateforme de données centralisée (lire également page 28) a perturbé le fonctionnement du marché de l’énergie en Région de Bruxelles-Capitale. Pour rappel, cette plateforme développée par ATRIAS est chargée de gérer le transfert des données entre les GRD et les fournisseurs. « Les problèmes informatiques rencontrés lors du lancement du MIG6 ont eu un impact direct sur des centaines de consommateur·rice·s bruxellois·es », explique Karine Sargsyan. « Certain·e·s ne sont pas parvenu·e·s à obtenir de nouveaux contrats car leur demande a pris des mois avant d’aboutir. D’autres ont éprouvé des difficultés lors de leur déménagement ou pour obtenir des factures de clôture. »

Suite à ces dysfonctionnements, les call centers des fournisseurs ont été pris d’assaut et sont rapidement devenus inaccessibles. Pour répondre au désarroi des consommateur·rice·s, le service des Litiges de BRUGEL a dû gérer des mesures d’urgences engendrées par des coupures injustifiées. Face à l’ampleur de la situation, ce service s’est également attelé à effectuer un important travail d’information auprès du public.

Indemnisation en cas d’interruption de fourniture

Le service des Litiges de BRUGEL a poursuivi sa mission d’arbitrage quant à l’application des règles en vigueur et s’est penché plus particulièrement en 2022 sur le régime d’indemnisation en cas de coupure.

Dans son rapport 2021 sur la qualité des services et les pratiques non discriminatoires à l’égard des fournisseurs, le gestionnaire du réseau de distribution avait abordé la question des demandes d’indemnisation pour les interruptions de fourniture supérieures à 6 heures. BRUGEL avait alors émis des recommandations pour que le GRD fasse preuve de plus de proactivité envers les consommateur·rice·s. « En 2022, nous avons eu la satisfaction de constater que Sibelga avait tenu compte de nos précédentes remarques et s’est montré beaucoup plus proactif sur le dossier des demandes d’indemnisation suites aux coupures. Le GRD avait notamment multiplié les communications dans les zones concernées par ces interruptions. Résultat, plus de demandes d’indemnisation ont été enregistrés en 2022 », explique Farid Fodil Pacha, responsable du service Marché et Réseaux.

BRUGEL étudie également la possibilité de mettre en place l’automatisation du processus d’indemnisation. Ce type de procédure permettra à l’ensemble des ayants droit de bénéficier de cette indemnisation, même sans la demander comme c’est le cas aujourd’hui. « Nous sommes convaincus qu’une indemnisation automatique par le GRD s’impose pour éviter le non-recours au droit. Au regard du système actuel, nous constatons que le nombre de demandes d’indemnisation augmente, mais reste anormalement bas par rapport aux personnes qui sont réellement impactées par ces coupures chaque année », ajoute Karine Sargsyan.

 
Nous sommes convaincus qu’une indemnisation automatique par le GRD s’impose pour éviter le nonrecours au droit.
Karine Sargsyan
Responsable du service Juridique et du service des Litiges